Renouvellement des lunettes cassées et remboursement par la Sécurité sociale

Écrit par Matthew Robinson le . Dans la rubrique La forme

Il n’y a nul besoin d’une ordonnance pour que le renouvellement à l’identique de lunettes cassées soit pris en charge par la Sécurité sociale ! Si la vue a changé, c’est une autre histoire…

Contrairement à ce qu’affirment de nombreux sites Internet, il n’y a aucune raison pour que l’on demande à un assuré social qui a cassé ses lunettes correctrices une ordonnance pour que leur renouvellement à l’identique soit pris en charge par l’assurance-maladie. Si les verres correcteurs doivent être adaptés à un changement de vue de leur porteur ou si les lunettes sont celles d’un enfant de moins de 16 ans, les règles sont différentes.

Le renouvellement à l’identique sans ordonnance est possible

Les lunettes, composées de verres correcteurs et d’une monture, sont des dispositifs médicaux à usage individuel inscrits sur une liste, appelée liste des produits et prestations (LPP), établie après avis d’une commission de la Haute Autorité de santé (HAS) mentionnée à l’article L 165-1 du code de la Sécurité sociale. À ce titre, l’article R 165-24 de ce même code s’applique donc aux verres correcteurs et à la monture. Que dit cet article ?

Article R 165-24
Modifié par Décret n° 2001-256 du 26 mars 2001 — art. 1 JORF 28 mars 2001

Le renouvellement des produits mentionnés à l’article L. 165-1 est pris en charge :

– si le produit est hors d’usage, reconnu irréparable ou inadapté à l’état du patient,

– et, pour les produits dont la durée normale d’utilisation est fixéepar l’arrêté d’inscription, lorsque cette durée est écoulée ; toutefois, l’organisme peut prendre en charge le renouvellement avant l’expiration de cette durée après avis du médecin-conseil.

Les frais de renouvellement ou de réparation des produits mentionnés à l’article L. 165-1 ne peuvent être pris en charge qu’une fois leur délai de garantie écoulé.

La LPP n’ayant pas prévu une « durée normale d’utilisation » pour les verres correcteurs ou la monture, seule la première partie de l’article R 165-24 importe. Il est donc clair que des lunettes hors d’usage ou irréparables doivent être prises en charge par l’assurance-maladie sans qu’il soit nécessaire de fournir un quelconque document à l’opticien pour un renouvellement à l’identique.Lunettes jaunesL’opticien devra quant à lui respecter les textes l’obligeant à remettre un devis au client avant de lui vendre de nouvelles lunettes conformément à l’arrêté du 23 juillet 1996 relatif à l’information du consommateur sur les produits d’optique médicale. Il devra aussi fournir une facture au client et adresser les formulaires adaptés à la Sécurité sociale pour le remboursement en précisant qu’il renouvelle un produit hors d’usage ou irréparable.
Le client peut aussi vérifier que la garantie de ses lunettes proposée par l’opticien ne couvre pas la casse (ce qui est excessivement rare chez l’adulte) ou que ce type d’accident n’est pas couvert par l’une de ses assurances personnelles. Les conditions de garantie des lunettes doivent figurer sur le devis qu’a obligatoirement reçu le client avant d’acheter ses lunettes (voir plus bas). Pour les contrats d’assurance, la personne dont les lunettes sont cassées doit se reporter aux différents contrats qu’elle a signés (contrat d’assistance, forfait bancaire, assurance sportive ou scolaire, etc.).

Si la vue a changé, une ordonnance devient indispensable

Avant de renouveler les lunettes dans une telle situation, rien n’interdit à l’opticien de pratiquer un examen de vue, à ne pas confondre avec l’examen médical réalisé chez l’ophtalmologiste, comme la loi le précise. Si la correction n’a pas changé, il s’agit d’un renouvellement à l’identique et la prise en charge est prévue comme cela a été expliqué ci-dessus. Si la vue a changé et que le client souhaite que les nouveaux verres soient adaptés à sa vue, les règles concernant la prise en charge par l’assurance-maladie changent. Si l’opticien doit adapter les verres correcteurs à la nouvelle réfraction du client, l’article L 4362-10 du code de la santé publique s’applique alors.

Article L 4362-10
inséré par Loi nº 2006-1640 du 21 décembre 2006 art. 54 II Journal Officiel du 22 décembre 2006

Les opticiens-lunetiers peuvent adapter, dans le cadre d’un renouvellement, les prescriptions médicales initiales de verres correcteurs datant de moins de trois ans dans des conditions fixées par décret, à l’exclusion de celles établies pour les personnes âgées de moins de seize ans et sauf opposition du médecin.
L’opticien-lunetier informe la personne appareillée que l’examen de la réfraction pratiqué en vue de l’adaptation ne constitue pas un examen médical.

C’est dans ce cas que l’opticien demandera au client de lui fournir un duplicata de sa précédente ordonnance afin de s’assurer que celle-ci date bien de moins de trois ans et que l’ophtalmologiste n’a pas spécifié qu’il s’opposait au renouvellement. S’il n’a pas ce duplicata, l’opticien ne pourra pas adapter les verres et demander la prise en charge à la Sécurité sociale. S’il le fait, s’il fait passer un équipement dont les verres ont été adaptés à la “nouvelle” vue du patient pour un renouvellement à l’identique ou s’il se contente de la parole du client, l’opticien engage sa responsabilité et pourra même se voir poursuivi pour fraude en cas de contrôle par l’assurance-maladie ou d’exercice illégal de la médecine en l’état actuel des textes. Pour plus de détails à ce sujet, il suffit de se reporter à l’article intitulé « Renouvellement de la prescription de lunettes par l’opticien ».
Si les lunettes cassées datent de moins de trois ans, la nouvelle paire adaptée par l’opticien pourra être prise en charge par l’assurance-maladie, conformément à l’article R 165-1 du code de la sécurité sociale. Si elles sont plus anciennes, le client doit être orienté vers l’ophtalmologiste pour obtenir une nouvelle prescription et bénéficier par la même occasion d’un examen médical permettant de dépister des maladies comme le glaucome ou le diabète.

Et pour les lunettes d’un enfant ?

Dans le cas des lunettes cassées pour un enfant ou un adolescent de moins de 16 ans, la question ne se pose pas. L’article L 4362-9 du code de la santé publique prévoit qu’ « aucun verre correcteur ne pourra être délivré à une personne âgée de moins de seize ans sans ordonnance médicale. » Pour les jeunes de moins de 16 ans, une consultation chez l’ophtalmologiste s’impose pour obtenir une nouvelle prescription afin que les lunettes puissent être délivrées et donc prises en charge.

Lunettes sur  un calendrierUne seule paire par an ?

Pour le remboursement par la Sécurité sociale, il faut aussi tenir compte des limites fixées par la LPP : « Avant le 6e anniversaire, la prise en charge des lunettes est assurée sans limitation annuelle d’attribution. À partir de l’âge de 6 ans et jusqu’au 18e anniversaire, la prise en charge de ces références est assurée dans la limite d’une attribution maximale par an. » Pour les personnes de plus de 18 ans, la LPP ne précise rien, ce qui implique une interprétation des textes par l’assurance-maladie. D’une caisse à l’autre, l’interprétation de la limitation à une paire par an en vertu de la LPP et de l’article R 165-24 du code de la sécurité sociale peut varier lorsqu’il est question de lunettes cassées… D’autant que la LPP ne précise pas non plus s’il est question d’année civile (le compteur est remis à zéro au 1er janvier) ou d’année calendaire (de date à date), là encore les interprétations peuvent diverger d’un organisme à l’autre. Si les lunettes cassées datent de moins de 12 mois, le plus simple est de prendre contact avec sa caisse d’assurance-maladie et d’obtenir un écrit qui évitera toute déconvenue par la suite.

Et les verres teintés ?

La prise en charge des verres teintés, en plus de répondre aux critères expliqués ci-dessus, est conditionnée à des exigences particulières de la LPP. « La prise en charge des verres teintés n’est assurée que dans les cas suivants : affections oculaires (conjonctivites intenses, kératites, iritis, cataractes centrales ou congénitales, rétinopathies) ; myopies fortes lorsqu’elles s’accompagnent de photophobie ; à titre exceptionnel, certaines photophobies lorsqu’elles n’entrent pas dans le cadre des affections précitées. » Si la LPP est respectée, l’opticien n’étant pas compétent pour juger d’une affection oculaire et cette dernière pouvant évoluer au cours du temps dans des délais bien plus courts que ceux relatifs à l’évolution de la réfraction, seul l’ophtalmologiste peut être à l’origine d’une telle prescription pour qu’elle soit prise en charge, que la dernière ordonnance ait plus ou moins de trois ans.

Remboursement par la mutuelle ou la complémentaire santé

Le plus sage est de commencer par relire son contrat. D’un établissement à l’autre, le remboursement de l’optique médicale est très variable et même d’un contrat à l’autre au sein d’un même établissement, il existe des différences. Certaines mutuelles ou complémentaires santé proposent un forfait annuel, certaines exigent une ordonnance, d’autres conditionnent leur remboursement à celui de la Sécurité sociale. Après avoir relu son contrat, le plus simple est de s’adresser à sa mutuelle ou à sa complémentaire santé et, si possible, d’obtenir un écrit.

Et si les lunettes ont été cassées par un tiers identifié

Dans un tel cas, l’assurance-maladie n’a pas à intervenir. C’est l’assureur en responsabilité civile de la personne qui a cassé les lunettes, après que le sinistre lui ait été signifié, qui prend en charge tout ou partie des frais.

 

Le plus simple : tout faire pour ne pas casser ses lunettes !

 

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Commentaires (7)

  • RICCI

    |

    Bonjour,
    J’ai cassé ma monture en janvier 2011. Les verres sont intacts et n’ont pas besoin d’être changés car ma vue a été contrôlée par mon opthtalmologue en Novembre 2010.
    L’opticien m’a délivré une feuille de soins (avec la mention MONTURE CASSEE) pour la transmettre à ma CPAM. Cette dernière m’a notifié hier (14/02/2011) que la monture sans les verres de correction ne peut pas être prise en charge. Du coup, ma mutuelle ne peut effectuer aucun remboursement complémentaire…
    Je n’arrive pas à vérifier, dans la nomenclature des produits et prestations remboursés par la Sécurité Sociale, la justification de ce refus de prise en charge par la CPAM : pouvez-vous m’aider ?
    Merci par avance et cordiales salutations.

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  • TIMMY

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    Bonjour
    Je suis confrontée à un problème identique, j’ai cassé ma monture de lunettes et alors que les verres ne sont pas à changer, si je veux être remboursé de ma monture il faut que je refasse mes lunettes complètement.
    Alors que la SS ne rembourse que 1,85€ sur la monture!!!
    Du coup, effectivement, du fait que la SS ne prend pas en charge, je ne peux pas avoir de remboursement de mutuelle …
    Chercher l’erreur ….
    Après on cherche ou se trouve le trou de la SS.

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  • slwoman

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    Bonjour,

    Dans mon cas présent, c’est l’inverse, j’ai fait tombé mes lunettes et un des verres s’est cassé, puis je me faire rembourser par la mutuelle ainsi que la sécurité sociale?

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  • gérald

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    suis dans un cas délicat, je venais juste de faire changer mes lunettes mon chien m’a fait trébucher et ma voisine reculait avec sa voiture et crac !!!
    Heureusement j’ai des lentilles pour la journée mais arrivé à une certaine heure le soir je les enlève !! donc je vois plus très clair.

    Que faire ?????

    Si vous avez une réponse je suis preneur.

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  • ahmed

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    es que la caisse de secouriste social rembourse les frais de la prescription d’un optométrie

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  • Audrey

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    Bonjour! Malheureusement j’ai perdu mes lunettes dans le métro il y a maintenant 3 jours. Y a-t-il un moyen de me faire rembourser mes lunettes égarées?? J’ai une deuxième paire en attendant mais c’est très précaire…
    Merci d’avance
    PS: Je suis mineure, est-ce important pour le remboursement ??
    J’ai entendu dire qu’en présentant un duplicatat de son ordonance ophtalmologique à son opticien on pouvait se faire rembourser des lunettes volées, est-ce vrai??

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  • Lilian

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    Bonjour, un ami a cassè mes lunettes. Il a fait une déclaration à son assurance et moi a la mienne. Il se trouve que son assurance me remboursera la différence SS et ma mutuelle. Je vais donc perdre la paire de lunette remboursable accordè chaque années par ma mutuelle. Je trouve inadmissible que l’assurance utilise ma mutuelle à mon détriment. Avez-vous une solution?

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